Les défenseurs de Polanski rament et…coulent

Frédéric Mitterrand vient de
vivre une semaine éprouvante. Marine Le Pen a réussi son coup en sortant de
son tiroir le best seller « La Mauvaise vie » et en pointant des écrits
qui font scandale. Peu de temps auparavant, le même Frédéric Mitterrand s’était
lancé dans une défense hasardeuse de Roman Polanski. Alors je n’avais pas
tellement envie d’évoquer ce sujet sur mon blog mais la lecture du bloc-notes
de Bernard-Henri Lévy dans Le Point de cette semaine me pousse à le faire. A la
lecture du titre du texte de BHL, « pourquoi je défends Polanski »,
je me suis dit qu’enfin j’allais pouvoir découvrir des arguments solides pour
défendre ce qui, à mes yeux, est indéfendable. Premier (et dernier) point positif de ce texte, BHL
utilise le mot « crime » pour qualifier les actes reprochés à Polanski.
Alors BHL s’empresse de préciser qu’il y a des degrés dans l’échelle du crime
et que le crime de Polanski n’est pas un crime de sang. Qui a prétendu le
contraire ? Personne n’a dit que Polanski avait tué quelqu’un et la
justice américaine ne le recherche pas pour meurtre. Elle le recherche pour
qu’il réponde de viol sur mineur de 13 ans ce qui est un crime abominable, que BHL
le veuille ou non.

Deuxième argument avancé par
Maître BHL : « la victime a choisi de pardonner, de tourner la
page » et on comprend donc qu'il faudrait que la justice fasse de même et tourne la page également. Il
précise même : « on a là des défenseurs des victimes qui savent
mieux que la victime ce qu’elle veut et ce qu’elle ressent ». Je pense
sincèrement que dans cette affaire, BHL perd toute sa lucidité. Avec le
raisonnement de BHL, si les victimes pardonnent, la justice devrait en tenir
compte et cesser toutes les poursuites. Mais qui fait la justice dans les états de droit ? Les victimes ou la loi ? Si ce sont les victimes,
alors cette laborieuse mécanique intellectuelle fonctionne dans les deux
sens : pour le pardon et pour la sanction. Si, comme le préconise BHL,
il faut tenir compte de ce que veut et ressent la victime, il faut également le
faire si celle-ci ressent de la haine jusqu’à souhaiter la mort de son
agresseur. Curieuse façon de défendre la justice que celle de BHL qui fait
primer le ressenti des victimes sur l’application de la loi. Quelqu’un qui se
rend coupable d’un crime, même si sa victime le lui pardonne, doit en répondre
devant la justice, devant la société. BHL le reconnaît du bout des lèvres dans
son texte tout en précisant qu’appliquer la loi n’est dans ce cas « est un
manque aux exigences de compassion et d’intelligence ». Poursuivre un
violeur est donc un manque "aux exigences de compassion et d’intelligence" ?
Pauvre BHL.
Un autre argument avancé par
l’écrivain consiste à dire qu’il y a « deux poids deux mesures » et
que si Polanski ne s’appelait pas Polanski, l’affaire serait enterrée depuis
longtemps. Deux remarques sur cet argument encore une fois très
laborieux : d’abord rien ne prouve que ce que dit BHL est vrai. Il y a de
nombreux exemples de coupables anonymes incarcérés des années après leur crime.
Imaginons que ce soit vrai, ceci reviendrait à dire que la célébrité vous expose.
Et alors ? N’est-ce pas ce que l’on appelle habituellement la rançon de la
gloire ? Être célèbre apporte de nombreux avantages mais aussi quelques
inconvénients : vous n’êtes plus un citoyen ordinaire et la moindre
affaire vous concernant est susceptible de déchaîner les passions. BHL semble
découvrir cette évidence.

Je passe sur les propos
consternants tenus par une partie des artistes qui dénoncent "un
traquenard policier" et qui pensent que « l'arrestation de Roman
Polanski dans un pays neutre où il circulait et croyait pouvoir circuler
librement jusqu’à ce jour, est une atteinte à cette tradition : elle ouvre la
porte à des dérives dont nul aujourd'hui ne peut prévoir les effets ». Lire ici. Ainsi, arrêter un violeur ouvre "la porte à des dérives dont on ne peut prévoir les effets". Pitoyable.


Pour finir un rappel des
faits : Polanski est accusé de viol sur mineure de 13 ans en 1977, il a
plaidé coupable, c’est un fugitif recherché depuis plus de 30 ans par la police
américaine et il était sous le coup d’un mandat d’arrêt. Il est en prison, il
doit être jugé et c’est tout, que ce soit Polanski, Pierre, Paul ou Jacques ne
change rien à cette affaire.

Flavien Neuvy

6 Comments

  • Didier MUNCH 12 octobre 2009

    Il ne faut pas oublier que le « pardon » de la victime aurait couté 500000$ à Polanski.
    La question qui se pose est donc bien celle de l’egalité devant la loi entre fortunés et miserables.
    Ceci etant ces dernieres semaines l’hypocrisie est de mise:
    Mr HOTREFEUX qui s’englue dans une defense pitoyable pour se defendre de propos manifestement racistes (là aussi la victime lui a pardonné…bien mal lui en a pris).
    Mr BESSON qui se ridiculise publiquement en faisant un doigt d’honneur à une camera….
    Mr HAMON et toute cette gauche « bien pensante » qui jette l’opprobe sur celui qu’ils ont tant aimé. C’est etrange que cette indignation ne se soit pas manifestée en 2005, lors de la sortie du livre. (mais c’est vrai il votait encore à gauche)
    Et le fin du fin, Mr MITTERAND pris la main dans le sac du jeu de l’appologie du tourisme sexuel, car c’est bien de ça dont il est question et non de pedophilie. Il s’agit de l’exploitation de la misere de certaines populations, qui là aussi pardonnent, à bon marché, pour quelques billets….
    Est ce plus convenable ? dans une republique où nos dirigeants sont censé avoir valeur d’exemple, la question est posée.

  • Flavien 12 octobre 2009

    C’est vrai qu’avec un beau chèque on arrive plus facilement à obtenir un pardon…Tu as raison sur un autre point Didier : les politiques doivent montrer l’exemple.

  • Stéphane 13 octobre 2009

    Bravo pour ton article Flavien! Je penses que tu as parfaitement résumé ce que tout le monde pense « ici-bas », par opposition à la pensée de nos soi-disantes élites « d’ici-haut ».

  • Delphine 13 octobre 2009

    Et encore, il a eu une certaine forme de chance de s’en tirer pdt pls années…c’est dingue ça. Et c’est pas parce que j’ai aimé la plupart de ses films que je vais le défendre, ne mélangeons pas tout, faisons la part des choses. Quant à ceux qui le défendent, je dirais juste qu’il y en a marre de ces gens gauchos pseudos artistes qui dégoulinent de leçons de morale à longueur de temps. Ca me fatigue :o(
    Le traitement de faveur ça ne les dérange pas apparemment…

  • Stéphane 13 octobre 2009

    Que la gauche soutienne un type comme ça, ça ne m’étonne plus après tout. Ce qui me désole en revanche c’est que la droite courre après pour se faire bien voir de ces milieux pseudo-intellos et « bien pensants ». Mauvais calcul: elle ne réussit qu’à se couper de sa base en faisant ainsi.
    L’UMP peut lancer une semaine de l’adhésion après ça… 🙁

  • Daniel 13 octobre 2009

    Je ne m’occupe pas que machin ou truc soit de gauche ou de droite. Polanski doit-être obligatoiremenr jugé ; on verra après s’il est coupable.
    Mais je suis autant scandalisé par la tentative de nomination de Jean Sarkosy à la tête de l’EPAD.
    Quand on postule pour un poste quelconque: on demande que la personne ait les diplômes et en plus l’expérience , en quelque sorte on lui demande d’être un mouton à 5 pattes.
    Or Jean Sarkozy n’a rien de tout cela .
    Ah ! Il est élu! Mais à Neuilly , même un débile avec l’étiquette UMP serait élu.
    M Sarkozy nous avait promis de mettre les meilleurs à chaque poste ; alors il nous propose son raté de fiston pour démonstration.
    Quand je pense à De Gaulle qui payait même ses pleins d’essence et à ces messieurs qui se disent Gaullistes en se srvant dans la caisse: Il me rappelle plutôt les résistants de dernière minute.

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