Création monétaire record dans le monde et…toujours pas d’inflation
Toutes les banques centrales du monde se sont mises à faire
tourner la planche à billets. En clair, elles se sont lancées dans une course
effrénée à la création de monnaie pensant que c’était le meilleur moyen de sortir
de la crise. Côté américain, la FED s’est montrée agressive avec ses fameux
« QE ». Elle continue d’opérer tous les mois à hauteur de 85
milliards de dollars. Entre septembre 2008 et mars 2013, la Banque centrale
américaine a racheté 2 200 milliards d’actifs et a triplé la taille de son
bilan ! La Banque du Japon quant à
elle vient d’annoncer un programme de création monétaire (acquisition nette de
titres) de 132 000 milliards de Yens soit l’équivalent de…30 points
de PIB d’ici fin 2014 !
C’est la monétisation de la dette, tout
simplement. Au final, toutes les banques centrales (y compris la BCE) ont
considérablement alourdi leurs bilans ces dernières années. Or, en agissant de
la sorte, elles génèrent automatiquement une explosion de la base monétaire M0
(la base monétaire regroupe la monnaie fiduciaire et les avoirs des banques
commerciales à la Banque centrale : réserves obligatoires et excédentaires
ainsi que les facilités de dépôt).
Malgré ces milliers de milliards déversés sur le monde, il
n’y a toujours pas le moindre signe d’inflation à l’horizon. C’est vrai aux USA
et en zone euro tandis qu’au Japon, c’est toujours la déflation qui menace. Cela
peut paraître surprenant au regard de la théorie quantitative de la monnaie. En
effet cette théorie nous apprend que le niveau général des prix est lié à la
quantité de monnaie qui circule dans l’économie. Plus de moyens de paiement
pour une quantité de biens et services échangés en font monter les prix. Or,
les Banques centrales augmentent considérablement la base monétaire et il n’y
aucune tension inflationniste constatée. Alors, comment expliquer que malgré ces
liquidités abondantes, l’inflation ne soit toujours pas de retour ?
D’abord, la base monétaire (M0) ne doit pas être confondue
avec la masse monétaire (M2 aux USA et M3 en zone euro) parce-que sa partie
scripturale n’entre pas dans la définition des agrégats M2 et M3 car non
directement mobilisable par les agents économiques traditionnels (ménages et
entreprises). Pour autant, la base monétaire influence directement la masse
monétaire. En effet, le « multiplicateur » de base monétaire était à
10 (pour 1 euro de liquidité supplémentaire on obtenait 10 euros de masse
monétaire en plus) avant la crise. Or, depuis 2008, le multiplicateur s’est
effondré (divisé par deux). En clair, les canaux de transmission de la
politique monétaire ne fonctionnent plus comme avant. La liquidité créée par
les banques centrales ne s’écoule plus dans l’économie. Cela se traduit par une demande de crédit plus faible
et illustre parfaitement la phase dans laquelle nous sommes actuellement qui
est une phase de désendettement des agents économiques. Si je devais illustrer
le propos, je prendrais l’exemple d’un terrain qui est gorgé d’eau par des
pluies abondantes. Si vous arrosez ce terrain, cela ne sert à rien, l’eau ne
s’infiltre plus car la terre n’a plus soif. Aujourd’hui, les Banques centrales
arrosent à coups de milliards des économies qui sont en phase de désendettement
et les effets de cette politique sont limités. Mais si les effets bénéfiques de
cette politique sont limités (donc pas nuls), les risques sont élevés et peu
pris en compte aujourd’hui. Cette liquidité abondante alimente les bulles
spéculatives de demain. On voit bien qu’une partie de ces liquidités alimente
de façon artificielle les marchés actions et on voit également une ruée pour
les emprunts d’Etat « exotiques » qui offrent des rendements
supérieurs à ceux des économies développées. Un krach obligataire n'est pas à exclure. Attention à ce que le remède ne se
transforme pas en poison.